Interview de Frédéric Back
M. Back a eu la grande gentillesse de répondre aux questions de nos amis de Buta-connection, en exclusivité pour la 7ème Ombre.
Buta connection : Nous avons remarqué, en visionnant chronologiquement votre uvre, que la cible semble avoir changé au cours du temps. Dans vos premiers travaux, il semblerait que le public visé soit enfantin (en utilisant l'esprit des contes pour enfants) Par la suite vos uvres s'adressent à un public de plus en plus mature ou plus averti. Comment expliquer ceci ? Est ce une transition entre l'esprit qui animait les émissions pour enfants avant votre entrée à Radio Canada, vers une prise de conscience de liberté d'expression qui vous dirigea vers une maturation des sujets et surtout des idées que vous tentez de faire passer (écologie, prise de conscience etc...)? Frédéric Back : Depuis 1952
jai travaillé pour les émissions Tv de Radio Canada
comme illustrateur, réalisateur de maquettes de villes, forts (
a grande échelle), et pour des émissions à caractère
scientifique. BC : Parallèlement et
toujours chronologiquement on remarque que les techniques et graphiques
et d'animation ont évolués. On passe du feutre et du découpage,
àde l'animation crayonnée sur feuille d'acétate.
FB : A la télévision de Radio Canada la cadence de production était rapide éphémère, mais généralement jetais passionné par les sujets proposés et donnait mon maximum et en qualité et en quantité pour les faire valoir. Donc en animation javais aussi des délais très courts ( 3 mois pour un film de 10 minutes ) et la technique utilisée et recherchée était celle correspondant le mieux possible aux problèmes à résoudre dans le minimum de temps Je travaillais seul avec occasionnellement une assistance de courte durée pour finaliser à temps. Pour cette raison, les animations au crayon sur feuille dacétate dépoli présentaient plusieurs avantages, car les choses peuvent être juste indiquées partiellement, colorées immédiatement. Je travaillais directement sur lacétate, nayant pas le loisir de faire des dessins sur papier préliminaires, la spontanéité était une forme datout, derreur aussi, souvent car beaucoup ont atterris à la poubelle. BC : L'animation de L'homme qui plantait des
arbres et celle du Fleuve au grandes eaux semble fixer un type d'animation.
Ce type et cette finesse du dessin, ainsi que les mouvements de caméra
dans lanimation elle-même que vous utilisez dans ces deux
films semblent sceller votre style graphique / d'animation. FB : Chaque film était pour moi une répétition pour essayer de faire mieux la fois suivante. Lorsque la caméra fut équipée dun ordinateur permettant de rendre la caméra automatique pour 7 mouvements bien calculés, et fiables, cela permettait de prévoir des mouvements plus sophistiquer sans risquer de tuer le cameraman Le tournage le plus complexe est sans contredit celui du fleuve aux grandes eaux. Radio Canada voulant éliminer le studio danimation et affectant les animateurs à dautres tâches, jai utilisé le prestige des mes 2 oscars pour conserver une caméra et un cameraman, et proposé un scénario en faveur de leau si précieuse. Dans le contexte de lutte et un sujet si immense à traiter, je ne cherchais quà faire un film qui renseigne sur des animaux des situations et des histoires que 99 % des gens ignorent. Je nai pas eu le temps, ni le budget, ni lappui, pour présenter le texte dinformation nécessaire dune manière plus suggestive et originale. Je voulais 3 voix dhomme et une voix de femme disant tour à tour des éléments du texte, mais avec des fondus, les laissant venir et disparaître comme des réflexions scellées dans lair des temps passés, se découvrant par hasard au cours du voyage. BC : Comment se fait il que vous ne soyez pas tombé dans le moule de l'animation sur celluloïd / gouache ? FB : Dans cette technique trop utilisée, on doit tout dessiner et colorer alors que 60% de ce qui est dessiné et sans intérêt, et que les lignes sont monotones et sans expressions artistique. Dans Illusion ? je mettais des couleurs à la bonne franquette et ne peignais pas jusquà la ligne, de manière à faire jouer le fond autour de la tâche. BC : N'avez vous jamais été tenté par le défi du long métrage. Quels sont les éventuels causes qui vous ont conduits à ce format de court-métrage ? FB : Pourquoi traiter pendant 100 minutes ce que lon peut dire en 30 ? Cest une heure de gagnée pour faire autre chose ou penser. Tous les films de Abracadabra à Crac ! etaient courts (de 8 à 15 minutes) et sans paroles afin de favoriser léchange international.
FB : Limage laisse un degré de liberté dinterprétation qui, selon le degré de connaissances, de sensibilité du spectateur prend des aspects bien différents. Les sons et la musique ajoutent énormément à limpression ressentie, et chaque spectateurs, chaque visionnage aussi, engendre des réactions particulières. Pour le fleuve aux grandes eaux , il ny avait malheureusement pas de beau texte existant ayant la valeur de celui de Fiona, mais je crois quil y a plusieurs passages de valeur qui donnent la dimension non visible dans les images. Dans la version anglaise ( publiée par les films du paradoxes ) nous avons eu le temps de retravailler le texte, den éliminer un peu, et la fin est plus forte, plus logique. BC : Quels sont les projets que vous auriez aimé adapter en film danimation et avez-vous des projets en préparation ? FB : Il y a bien des scénarios
et des idées qui sont restés dans mes tiroirs, mais je crois
quils moisiront dans cet état. Il y en a de terribles qui
concernent la surpopulation et la destruction des autres vies pourtant
si extraordinaires. Pour moi les animaux sont (sans le savoir, sans le
vouloir) les plus grands bienfaiteurs de lhumanité, et je
suis révolté par la manière dont on les exploite
et les élimine.
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